Je ne sais plus à quoi ça ressemble des jeunes dans une
polyvalente. Mais je sais à quoi ça
ressemblait à l’époque où moi j’y étais.
Une école secondaire de région tout ce qu’il a y de plus ordinaire. Une école publique, bien entendu. Je ne sais pas non plus si on peut faire un
lien boiteux entre ce que j’ai vécu à l’époque et le taux de décrochage
scolaire actuel, mais je vais quand même le faire. Quand j’étais au secondaire, avoir la lecture
comme passe-temps, ce n’était pas très tendance. Il valait mieux être un sportif ou un artiste. Être dans le club d’athlétisme, remporter des
médailles, participer à des tournois la fin de semaine, s’entraîner le midi et
après l’école, ça c’était digne de mention. Faire partit du spectacle annuel de fin
d’année, gratter de la guitare, pousser de la corde vocale, danser habiller en
noir avec des masques de couleur, là, tes pairs pouvaient te respecter et
aspirer à être ton ami. Mais étudier et
être bon à l’école, WOUAAAAAAACH !!!! Un nerd.
Une bolée. Tout, mais pas ça. Dans mon
temps, bien réussir t’amenait le mépris de tes contemporains. Étudier ? Faire ses devoirs ? Autant dire
adieu aux plaisirs, au bonheur, à la vie en général. Aïe !!! Fuck the school
!!!
« Ostie de bolée ! » Le nombre de fois où je
l’ai entendu celle-là. À chaque fois qu’on voyait un 90% d’affiché sur ma
feuille, que dis-je, même un 80% était parfois suffisant. Aveu : il m’arrivait de cacher ma copie
et lorsqu’on me demandait combien j’avais eu, je disais 72% pour qu’on me fiche
la paix. Aveu encore plus
troublant : j’ai déjà fait une erreur volontaire dans un examen de
biologie parce que je savais que sinon j’aurais 100% pis que je me ferais
écœurée avec ça. Il fallait être fait
fort, à mon école secondaire, pour assumer ses bonnes notes. Quand la réussite scolaire est non seulement
pas valorisée pantoute, mais qu’elle est en plus un motif d’intimidation, c’est
clair qu’il y a un problème.
Pour qu’elle soit valorisée, il faudrait que
la réussite scolaire soit cool. Aussi
cool que de jouer du drum ou de
compter un but gagnant. Mais faire des phrases complètes et écrire sans faute
d’orthographe, c’est loin d’être aussi flamboyant. Entre moi, qui réussit la
première à résoudre un problème de mathématique complexe, et l’autre, qui
réussit à frencher le grand Martin
dans le fond de la rangée de casier, je vous laisse deviner qui sera applaudit.
Ça
me fait toujours rire quand je vois des parents si fiers que leurs tout-petits de
3, 5, 7 ou 8 ans s’intéressent aux livres, « Ah! Moi, ma fille, elle aime
assez les livres. Je n’arrête pas de lui
en acheter. Je ne fournis pas. » Et
dans 10 ans, la même petite fille aura grandi et aimera encore autant les
livres, mais là ça ne sera plus la même histoire. Les parents ne diront plus à qui veut
l’entendre que leur fille passe ses journées à lire. On verra dorénavant cela comme une tare. On s’inquiètera qu’elle soit solitaire,
qu’elle ne préfère pas les fêtes aux bouquins.
On souhaitera qu’elle s’intéresse à autre chose, qu’elle sorte de son
monde imaginaire. Elle ne sera plus dans
le coup.
« Ce n’est pas tout dans la vie d’être bon à l’école ». C’est vrai.
Mais ce n’est pas avec ce genre de phrases qu’on va donner envie aux
jeunes de réussir.
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