Je me rappelle encore de la
première fois que je les ai rencontrés (je devais avoir 20 ans à l’époque). Une famille comme dans les films. Le genre de
famille parfaite. À sa tête, un couple
marié depuis si longtemps qu’on ne compte même plus les années. Un couple que tu
peines à les imaginer l’un sans l’autre.
Le Yin et le Yang.
Les deux qui ne font qu’un. Un modèle de stabilité et de
durabilité. Ce qui frappe le plus quand
on les voit pour la première fois, c’est à quel point ils sont assortis, autant
physiquement (même cheveux blancs, même taille, même façon de s’habiller) que
psychologiquement (même obligeance, même
érudition).
Elle, elle est ultra sympathique. Douce, aussi.
L’imaginer en colère relève de la science-fiction. Elle est également hyper-méga-organisée,
genre vraiment intense. Lui, il est
ultra sympathique également.
Attentionné, aussi. Alors que
j’allaitais mon bébé naissant seule dans un coin sombre pendant une fête de
famille, c’est le seul à avoir pensé à me sauver un morceau de dessert et à me
l’avoir apporté. De la classe, tu
dis. Il a occupé des postes importants
dans sa carrière, comme mon beau-père, et, comme lui, il aime bien en parler et
raconter ses hauts faits d’armes.
Donc, revenons à cette première rencontre. C’est dans le temps des fêtes, je crois. La table est parfaitement mise. Tout le monde se présente. Il y a les trois garçons et la fille. Il y a le plus jeune, le plus petit, aux yeux
bruns perçants, volubile, drôle et à l’aise comme un animateur de télé. J’ai l’impression de côtoyer une vedette
tellement son aura est grande. Ensuite,
il y a celui du milieu, humble et brillant. Il possède une sorte d’intelligence
naturelle qui pousse toute seule. Il est
drôle aussi, plus pince sans rire par contre.
Et finalement l’aîné, grandiose et volubile aussi, sûr de lui. L’artiste, l’ingénieur et
l’entrepreneur. La famille parfaite, je
vous dis. Il me reste la fille, mais je
me la garde pour une autre fois.
Au fil de la soirée, je m’aperçois qu’ils ont tous (ou on eut
par le passé) des passe-temps de riches (voile, plongée sous-marine, danse
classique, violoncelle, etc.). Toutes
des choses que j’associe à l’époque aux biens nantis. J’ai l’impression d’assister à une fête de
famille d’une autre classe sociale.
Au moment du repas, la maman nous informe que c’est elle qui
a préparé le repas, mais que ce sont ses enfants qui vont assurer le
service. Alors, pendant le souper, ils
sont trop beaux à voir, un s’occupe des verres d’eau, l’autre des verres de
vin, un autre sert les assiettes et le dernier desserre. L’harmonie.
En apparence du moins.
Après le souper, on me demande si je veux un pink lady. Je ne sais même pas ce que
c’est un pink lady. Un drink de riche, j’imagine. Je dis quand
même oui. Je suis plutôt surprise quand
je vois le drink rose bonbon
arriver. Dans de l’argenterie, ma foi. C’est la première fois de ma vie que je bois
dans de l’argenterie. Pas mauvais le pink
lady.
Mais le clou de la soirée, c’est quand ils se mettent tous
à chanter et à jouer de la musique (pis pas du zing zing de gratteux de guitare,
là). Moi, je suis là, avec ma coupe en argenterie remplie de liquide rose
bonbon et je regarde cette famille exécuter des chants mélodieux. Je suis alors partagée entre deux sentiments,
tout cela étant tellement loin de ma réalité habituelle (voir Contry girl). D’une part, je les juge un peu, je les trouve
bourgeois. D’autre part, je me sens
attirée par leur monde, par cette vie qui m’apparaît chic et de bon goût.
Sur le chemin du retour, je me suis dit que cela avait été
une immersion en terre inconnue et j’étais encore perplexe dans ma tête. Mais ce que je me rappelais surtout, c’était
de leur grande gentillesse, à tous.
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