On déménage dans 4 jours. Je n’y arriverai pas (je parle au je, car je fais l’essentiel des boîtes,
mon chum, pendant ce temps-là, fait d’autres choses d’utiles, mais pas des
boîtes). Nous sommes littéralement envahis,
nous peinons à circuler dans la maison sans nous cogner le gros orteil sur le
coin d’une boîte. J’étouffe. J’ai chaud.
Je panique. C’est impossible, il
y a trop de placards, trop de sous-sol, trop de souvenirs, trop de « au
cas où, ça pourrait être utile un jour… », trop de traîneaux, trop de
pelles pour enfants, trop de freeze bee
cassés, trop d’ustensiles de cuisine dépareillés, trop de verres de bière (je
pense qu’on pourrait recevoir 50 convives et leur offrir chacune leur bière
dans un verre), trop de dessins et de bricolage d’enfants, trop de vêtements
(mon chum me dit que la compagnie de déménagement qu’on a engagée a prévu trois
boîtes garde-robe, je lui réponds que c’est nettement insuffisant, j’en demande
six, mon chum pense que j’exagère, finalement j’en remplirai quatre juste avec
mon linge, manteaux exclus). Pis Y FA CHAUD !!! Une amie, tel un ange descendu
du ciel, nous offre de garder les enfants pour deux jours, le temps de notre
déménagement. Je vais lui être
éternellement reconnaissante. Nous
pensions nous, pauvres innocents, que c’était possible de déménager avec des
enfants qui courent partout autour des boîtes.
La veille du grand branle-bas, nous nous sommes mis
littéralement à garocher des trucs
dans des boîtes n’importe comment (j’ai retrouvé un jeu de quilles pour enfants
avec les bottes d’hiver et mon plat à fruit à côté des vieux vinyles de mon chum). J’ai laissé une brassée dans la sécheuse (moi
qui pensais y arriver, au moins une fois dans ma vie, à avoir tout le linge de
ma famille plié et rangé, ben non, dans une autre vie peut-être).
Le jour J est arrivé.
Il faisait chaud, toujours plus chaud.
Douze heures de déménagement.
Découragement maximal. Même les
déménageurs n’en revenaient pas. Le
patron m’a dit que ça ne paraissait pas vraiment que j’avais épuré mes affaires
et mon chum en a entendu un
dire :
-
Shit ! Quand
tu penses que c’est fini, tu en trouves encore !
À un certain moment, ils
avaient l’air tellement exténués que j’ai failli leur dire de tout laisser là,
sur le gazon, devant la maison, qu’on allait s’en occuper. Mais ce n’était pas très réaliste : on
n’avait pas la moitié de leur force physique.
Après, est venue l’étape libératrice du défesage de boîtes. J’ai même instauré un rituel avec mes enfants
pour les motiver à déballer leurs propres affaires : à chaque boîte
défaite, nous avions le droit de la kicker
en bas de l’escalier. Ce fut un énorme
succès.
Ensuite,
je me suis mise à lancer mes vieux livres dans des boîtes, mais pour les donner
cette fois-ci. Cuisiner avec des
champignons sauvages ? Allez hop, passer au suivant.
Cela
fait maintenant une semaine que nous sommes déménagés, et il y a encore des
boîtes partout. On a beau avoir rempli
une remorque au complet de boîtes pour le recyclage, j’ai l’impression qu’on a
emménagé hier. Je pleure. Je vais mourir ensevelie sous les
boîtes. Je suis tannée de me chercher,
tannée de contourner des obstacles pour aller faire pipi, tannée de me
dire : « OK, aujourd’hui je vide telle pièce de ses boîtes,
c’est un projet prioritaire » et de ne pas y arriver, je suis tannée de
regarder mes armoires de façon désespérée en me disant « ça ne rentrera
jamais », je suis tannée de laver des affaires (des fonds d’armoires, de
la vaisselle avec des traces de papier journal, de la literie qui a servi à
emballer des trucs fragiles, un plancher, un plafond, des livres poussiéreux,
un bac de plastique enfin vide, prêt à recevoir de nouvelles affaires et notre
linge quotidien, bien entendu. Je ne
vois plus la fin de ce déménagement. Je
vois le retour au travail et la rentrée scolaire se pointer le bout du nez et
j’hyper ventile légèrement. Mon amoureux dit que je vois tout en noir, il a
probablement raison, mais pendant que je me débats avec mes boîtes
poussiéreuses, lui, y chill sur son
nouveau tracteur à gazon, loin de ses vieilles affaires (avoir autant de
vinyles et de CD de Pat Metheny, ça ne se peut juste pas). Et pour bien enfoncer le dernier clou de mon
cercueil, mon fils me dit : « ça ne changera pas grand-chose que tu
retournes au travail, de toute façon, tu n’es pas vraiment avec nous, tu es
tout le temps en train de faire des boîtes ou de ranger des
affaires ». Bon là, je suis encore
de sombre humeur et je me dis que c’est ça la vie d’une maman : sacrifices
et manque de reconnaissance.
Bon,
j’y retourne, allez, une boîte à la fois, vers de meilleurs lendemains.
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