jeudi 24 août 2017

Pourquoi j'haïs le sport


J’haïs ça depuis toujours je pense, c’est juste que parfois, j’oublie, mais il y a des moments, comme aujourd’hui, pour me le rappeler.

          Contexte : voyage familial en Gaspésie, Parc Forillon, avec un couple d’amis et leurs 3 enfants.  Nous décidons de faire une petite randonnée pédestre de 6.4 kilomètres aller-retour, dénivellation de 60 mètres, pour aller Au bout du monde, à l’extrémité est de la péninsule gaspésienne.  Bébé facile, diront certains.  Ouin, mais pas pour moi.

          On part, il fait chaud, très chaud pour un été gaspésien.  Il y a une brise saline, mais pas toujours.  On marche, on marche, on marche.  Peu après notre départ, je pense à cette phrase que mon cadet a dit, il y a deux jours, en se traînant les pieds lors d’une autre randonnée sur l’île Bonaventure : « Mais qu’est-ce qu’on fait ici ? », ou encore : « On a fait tout ce chemin juste pour voir des oiseaux ?! ».  Je me demande justement ce que je fais là à avoir chaud dans la poussière alors que je pourrais être sur la plage à me faire bronzer tranquillement ou à jouer innocemment dans les vagues.  Mais bon, le paysage est quand même beau et je me dis que ça va peut-être me faire perdre quelques kilos et me donner une allure un peu plus athlétique et un peu moins molle.

          Mais alors que je me dis qu’on doit bientôt arriver à ce fameux bout du monde, je vois The côte.  Elle me semble infinie.  J’essaie de ne pas me décourager et de me dire que j’ai juste à y aller un pas à la fois.  Mon aîné est déjà rendu en haut (il a monté la côte pratiquement en courant), mon cadet est derrière avec son père, complètement désespéré.  À mi-chemin, j’ai chaud, je n’ai plus de souffle, je calerais 28 litres d’eau, je sue de partout (avec l’air salin j’ai l’impression d’avoir de la colle sur toute la surface de la peau) et j’ai mal à la tête tellement le soleil est assommant.  J’ai beau chercher, je n’ai absolument AUCUN plaisir à ce moment, je ne trouve RIEN d’agréable à ce que je vis.  Je souffre.  Je ne peux pas aimer quelque chose qui est souffrant. Voilà. C’est tout. Ce n’est pas compliqué. Même rendue en haut de la côte, même rendue au bout du monde, je n’éprouve aucune satisfaction, j’ai juste le goût de mourir.  Je me couche sur le dos à l’ombre et j’attends que ma patate se calme le pompon.  Mon aîné me regarde d’un air interloqué : « Mon Dieu, maman, qu’est-ce qui t’arrives ? Tu as l’air épuisée ! ». Très drôle.  Je laisse mon chum s’occuper du pique-nique, moi je n’existe plus.  Je n’arrive même pas à trouver la vue belle, je ne vois plus rien.  Les enfants se chicanent pour savoir qui va avoir le ficello de crocodile, ce n’est pas mêlant, si j’avais assez d’énergie, j’en lancerais un en bas de la falaise ! (Ben non, je ne ferais jamais ça). Ce matin, il ne me restait plus qu’une seule petite boîte de jus, je me suis dit que je pourrais la partager entre les deux garçons, mais là, je suis tellement déshydratée que je décide de me l’enfiler au complet. Je le sais, ça fait dur, et je me sens cheap après. Mais ça ne dure que quelques instants car, je me dis ensuite que s’ils ont encore assez d’énergie pour se chicaner, ils n’ont pas de besoin d’un petit jus sucré pour se requinquer !

          Et puis, non seulement les sports c’est souffrant, mais je n’y ai en plus aucune aptitude.  Quand, dès la maternelle, c’est toi qui court le moins vite, toi qui ne réussit jamais à envoyer le ballon au bon endroit et encore moins à l’attraper, toi qui est toujours choisit en dernier dans les sports d’équipes, c’est pratiquement impossible de développer une relation saine avec les sports. Toute ma vie, j’ai toujours été celle qui traîne loin derrière ; la dernière en ski de fond, en patin, à la course, en vélo, à la marche, name it. Et n’essayez pas de me dire des conneries du genre l’important c’est de participer ou bien l’important c’est de t’améliorer, il faut te comparer à toi-même, ce n’est juste pas vrai, tout être humain a un minimum d’orgueil et ne veut jamais être le plus poche, avouez que c’est toujours rassurant de regarder derrière son épaule et de voir qu’on est pas le/la dernière ou de remarquer quelqu’un qui se la pète plus souvent que nous, ça procure un genre de soulagement.  Imaginez maintenant que ce soulagement ne vient jamais.  Il m’est même déjà arrivé, encore  récemment, qu’on pense que je fasse des blagues, que je fasse exprès d’être poche : « Sérieux ?! C’est ton plus vite ça ? Non ! Pour vrai ?».  Je ne peux pas aimer quelque chose qui est source d’humiliation.  Vous aurez beau me parler d’endorphines et de saines habitudes de vie, ça ne fait juste pas le poids face à tous mes traumatismes.

          Maintenant que je ne suis plus aux prises avec des cours d’éducation physique obligatoires, je peux REFUSER toutes propositions sportives confondues.  La ballade de groupe en ski de fond, c’est non.  Je ne vais pas encore traîner derrière le groupe, essoufflée et en douleur, maintenant que j’ai le choix, je ne vais pas m’infliger ça. On ne demande pas à un dyslexique d’aimer la lecture, alors ne me demandez pas d’aimer le sport !

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