jeudi 22 février 2018

Moi, mes motoneiges ne vont pas bien bien loin.


Trois motoneiges.  C’est ce que je possède.  En garde partagée avec ma sœur.  Héritage de feu mon père.  Cet hiver, il y en a une qui est quasi décédée.  Elle agonise tranquillement au fond de la grange.  Il m’en reste donc deux de fonctionnelles.  C’est le deuxième hiver où moi et ma sœur sommes responsables des bêtes.  Avant, nous étions des princesses.  Mon père préparait les bêtes, les nourrissait, les entraînait et nous, il ne nous restait plus qu’à les monter et à nous pavaner dans des sentiers bien entretenus.  Mais ouvrir des pistes dans la neige folle avec une bête ankylosée, c’est autre chose.

          L’an passé, je suis restée prise en tout début de parcours en descendant une côte.  Je ne savais même pas que ça se pouvait, se prendre quand tu descends. En plus, j’ai tendance à être orgueilleuse lorsque je me prends.  Je m’obstine à vouloir me déprendre toute seule.  Quitte à me barrer le dos.  Je vais la sortir de là que je me dis, pas question de revenir bredouille à la maison.  Alors, je me lance.  Je commence par creuser autour de la motoneige pour dégager l’espace.  Ensuite, il faut la sortir du trou qu’elle a fait en s’enfonçant, tasser son derrière, tourner ses skis.  Je force autant que je peux, je pense à plier mes jambes, je réussis à la tasser de quelques centimètres.  J’essaie une autre fois.  Je pousse.  Je tente de la repartir.  Je spin dans le beurre.  Je parviens à la tasser de 2 cm.  Je tire sur les skis comme une demeurée.  J’ai chaud.  Je garoche ma tuque au bout de mes bras et je détache mon manteau.  Je réussis à la bouger d’un cm.  Je suis découragée.  Je décide de creuser encore plus autour, peut-être que ça va aider, vu que j’arrive à peine à la bouger.  J’ai le cœur qui bat à cent milles à l’heure.  Pas besoin de faire de zumba que je me dis.  J’essaie de la partir encore, j’avance un peu…et me renfonce encore plus. Là, je deviens comme enragée, je me mets à pousser et à tirer dans tous les sens.  En fait, ce qui me frustre le plus dans ces moments-là, je crois, c’est mon manque d’autonomie.  La position de dépendance dans laquelle me place cette foutue motoneige.  Parce que je suis de plus en plus obligée d’admettre que je n’y arriverai pas seule.  Je vais devoir attendre que quelqu’un soit disponible pour venir me déprendre et ça, ça me met en maudit.  Mes faibles muscles me rendent dépendante. Tiens, ça pourrait être une bonne motivation pour m’inscrire au gym ça !

          Cette année, je me suis dit qu’il fallait que j’analyse davantage la situation (genre quantité et consistance de la neige) avant de me lancer tête baissée dans l’ouvrage de pistes.  Alors, je me lance une journée où il n’y a pas trop d’accumulation de neige, où il ne fait pas trop chaud ni trop froid.  Je pense même à vérifier s’il y a assez d’essence avant de partir. Aille ! Je ne suis pas une débutante quand même !  Je vérifie donc dans le réservoir sous le guidon. Ah ! Ah ! Plus rien. Assez fière de mon super cerveau qui a pensé à vérifier cela.  Je vais chercher le bidon d’essence dans la grange comme une vraie professionnelle.  J’installe le bec.  Je verse.  Rien.  Il y a pourtant bel et bien de l’essence dans le bidon.  Je zigone un bon bout de temps après le sapristi de bec verseur et je finis par trouver le bouchon qu’il faut retirer.  Je remplis le réservoir.  Je pars faire un premier tour.  Tout va bien.  Je m’enthousiasme et décide d’attacher le traîneau derrière la motoneige et d’amener les enfants glisser.  Cela ne fait pas deux minutes que je roule que la motoneige arrête d’un coup sec.  Désespoir.  Je crinque, je crinque, je crinque.  Rien n’y fait, elle ne repart pas.  J’ouvre le capot.  Je ne sais pas pourquoi j’ouvre le capot, peut-être pour faire mine que j’y connais quelque chose en mécanique.  Évidemment, mon œil aiguisé ne remarque rien d’anormal.  Alors, mon chum me voit et part avec la deuxième motoneige, tel un preux chevalier sur son cheval à gaz, au secours de sa princesse orgueilleuse.  Il ne fait pas trente secondes que son cheval est capout lui aussi.  OK là, on a l’air de deux beaux tatas avec, non pas une, mais deux motoneiges qui ne fonctionnent plus à moins de 300 mètres de la maison alors qu’il neige à plein ciel.  Mon chum me rejoint, il vérifie l’essence (Ah ! Ah ! Le réservoir est plein grâce à super moi !) et il ne réussit pas plus que moi à la repartir.

          Sur le chemin du retour, la motoneige utilisée par mon chum finira par repartir, comme ça, tout simplement.  On devra faire venir quelqu’un pour faire réparer l’autre qui ne veut rien savoir.  Verdict du réparateur : panne d’essence.  Impossible.  Ben oui, c’est possible.  Il paraît que j’ai rempli la réserve et non le réservoir principal. B-R-A-V-O.

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