jeudi 6 septembre 2018

Dans mes boîtes (partie 1)





Il paraît que le mieux c’est de commencer par les livres.  Vider les bibliothèques et les étagères puis mettre les livres dans des boîtes.  Des livres, on n’a pas besoin de ça au quotidien, surtout des livres qu’on a déjà lus.  Je me dis que je pourrais donner les plus vieux, les plus usés, ceux que j’ai le moins aimés, mais je ne le fais pas, je les garde tous, je trouve ça beau des livres.  À mesure que je les mets dans des boîtes, je vois ma vie passer.  Les romans policiers de mon adolescence, les lectures obligatoires de mon court passage en lettres au cégep, mes nombreux romans du début de l’âge adulte (les études terminées et pas encore d’enfants, ça laisse un peu de temps), mes livres sur la maternité et sur l’achat d’une première maison, les livres de Stieg Larsson que j’ai lu en allaitant mon premier enfant qui n’en finissait plus de boire, Les accoucheuses que j’ai lu enceinte (très mauvaise idée soit dit en passant),  Jane Eyre de Charlotte Brontë qui m’a bouleversé, lors de mon été aux Îles de la Madelaine, tous ces livres d’Amélie Nothomb, dont j’admire l’écriture et l’intelligence à chaque fois, le mari de Mme Bovary, dont j’espérais ne pas avoir la lâcheté, Les cerfs-volants de Kaboul, que j’ai lu à Cape Code alors que mon aîné avait 2 ans, Mille Soleils Splendides, que j’ai lu par la suite et qui demeure l’un de mes livres préférés, Anna Karénine, dont seul l’orgueil m’a permis de me rendre jusqu’au bout, Les Mots pour le dire, de Marie Cardinal, qui traite de la maladie mentale et qui appartenait à ma mère, les livres de Gabrielle Roy, qui étaient à ma grand-mère et que je n’ai pas encore lus, honte à moi, les livres de mon père, plus scientifiques et philosophiques, Albert Jacquard, Hubert Reeves.

            Ensuite, j’y vais de façon assez aléatoire, une boîte ou deux dans la cuisine, une boîte dans la salle de bain, quelques boîtes au sous-sol.  Un ami me conseille d’y aller de façon plus systématique, genre tu commences une pièce et tu la finis, le sous-sol d’abord, la cuisine en dernier. Arrk…Je ne suis pas capable de faire ça, je trouve ça trop ennuyant, j’aime mieux me balader de pièces en pièces, d’une bibliothèque à une autre, d’une armoire à un fond de tiroir, de varier entre les petites boîtes et les grosses boîtes, entre les vieilles affaires et les affaires fragiles.  Je tombe sur des objets que j’ai achetés peu avant de quitter la maison familiale à l’âge de 16 ans.  Un grand miroir, un chandelier, un panier en osier.  Je les ai traînés avec moi pendant plus de 20 ans et ils sont toujours là, toujours beaux, toujours utiles.  Ils vont retourner chez eux, tout comme moi, après un long détour.  J’ai les larmes aux yeux en pensant aux cinq appartements et aux deux maisons dans lesquels ces objets m’ont suivie.  Je retrouve également une vieille boucle d’oreille perdue il y plus de cinq ans.  Je suis tellement contente de retrouver cette boucle d’oreille à 13 $ qu’on dirait que je viens de mettre la main sur un billet de mille dollars.  J’emballe des cadeaux que j’ai reçus, à chaque fois, je revois le Noël ou l’anniversaire en question.  À bientôt 40 ans, ça en fait des veilles de Noël et des bougies soufflées, j’ose à peine imaginer à 80 ans !  Il y a aussi de vieilles affaires de mon enfance que j’ai décidé de garder il y a 10 ans et qui, déjà aujourd’hui, ne font plus de sens.  Du vieux linge de poupée jauni et à moitié grugé par les souris ? WTF ?  Il faudrait que je fasse le ménage de mes affaires à chaque année, ou à chaque 2 ans, ou 5…mais je trouve toujours quelque chose de plus intéressant à faire.  Je ne peux pas croire qu’on va réussir à mettre tout ce qu’on a dans des boîtes, cela me semble surréaliste.  Mais je tente de rester positive, d’y aller une boîte à la fois.






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